Crimes et délires : de Raphaël Enthoven

Il faudra inlassablement revenir sur la fake news du « bombardement » de l’hôpital Al-Ahli Arabi à Gaza, car elle est exemplaire de la façon dont l’information est déformée. D’un côté, la fable du Hamas, selon laquelle une armée régulière, experte en bombardements ciblés et qui largue ordinairement des bombes lourdes, a délibérément visé un hôpital, faisant « 500 morts » invisibles tout en laissant un cratère dérisoire. De l’autre, les images de quelques voitures incendiées, d’un bâtiment intact, d’une roquette qui explose à la même heure au même endroit et l’enregistrement d’une discussion entre deux terro­ristes qui accrédite la version de l’armée israélienne. Et pour tant… C’est la première version qui est la plus populaire. Comment se fait-il que le scénario le plus improbable soit celui qui recueille les faveurs de l’opinion ? Par quelle hallucination collective le monde entier a-t-il choisi de croire le Hamas, plutôt que l’évidence ? Trois facteurs y contribuent.

1. D’abord, le rôle des petits télégraphistes. Qui, dans le monde entier, reprennent mot à mot les communiqués d’une organisation tenue par eux pour un mouvement de « résistance ». En France, ces gens-là s’appellent Mathilde Panot, David Guiraud, Louis Boyard, Danièle Obono, ­Thomas Portes ou Jean-Luc Mélenchon (et donc, Antoine Léaument). Tous ont colporté sans honte le texte du Hamas, et tous ont maintenu leur post ­malgré les démentis. Et pour cause : ils valident les chiffres du Hamas comme ils auraient promu les chiffres des organisations syndicales après une manifestation. La vérité, à leurs yeux, n’est ni un but ni un ­obstacle, dans la conquête d’un ­électorat.

2. Dans l’adhésion délirante aux fables du Hamas, il y a aussi le rôle non négligeable des grands coupables, encore tout surpris d’avoir osé défendre Israël pendant vingt-quatre heures, et qui, rêvant de se refaire une vertu dans la dénonciation d’un crime de guerre, se sont rués sur l’hypothèse du bombardement comme un pénitent se jette sur le fouet. À leur décharge, il arrive à ceux-là ­d’effacer leur post. Mais eux aussi, on les trouve dans toutes les démocraties qu’ils affaiblissent en étant eux-mêmes si faibles. En France, ces gens-là s’appellent Olivier Faure.

3. Au-delà de ces haut-parleurs du pire, l’incroyable popularité de la version du Hamas tient au fait que, par la gravité du crime qu’elle dénonce, elle offre à tous ceux qui voudraient assassiner des juifs le cadeau d’une excuse. Et c’est toute la particularité du Hamas, ce nazisme dopé aux sciences sociales : son rêve est de tuer tous les juifs, mais il lui faut une justification. À la différence de ses ancêtres hitlériens qui assumaient une détestation métaphysique et injustifiée du Juif, le Hamas persiste à se présenter comme la victime de ceux qu’il rêve d’exterminer jusqu’au dernier. S’il décapite des enfants ou s’il éventre des femmes enceintes, c’est parce que Nétanyahou n’est pas gentil. S’il organise des pogroms et s’il massacre des civils, c’est à cause du « sionisme ». Les gens qui croient approfondir les choses en justifiant la barbarie du Hamas par le contexte géopolitique sont, à leur insu, les relais actifs d’une entreprise d’extermination qui n’a besoin, pour passer à l’acte, que d’un alibi. 

par Raphaël Enthoven